La ruche musicale de Tanglewood
par Renaud Machart, envoyé spécial ( Le Monde)
par Renaud Machart, envoyé spécial ( Le Monde)
James Levine et l'Orchestre symphonique de Boston seront Salle Pleyel, à Paris le 4 septembre.
"La Damnation de Faust" (version de concert), d'Hector Berlioz.
Par Yvonne Naef, Marcello Giordani, José Van Dam, la Maîtrise de Paris,
le Tanglewood Festival Chorus, l'Orchestre symphonique de Boston, James
Levine (direction). Salle Pleyel, 252, rue du Faubourg-Saint-Honoré,
Paris-8e, le 4 septembre à 20 heures. De 10 € à 130 €. Tél. : 01-42-56-13-13.
C'est une fin d'été, une fin de partie presque, à Tanglewood, où se tient depuis le début du mois de juillet, comme chaque été depuis 1937, un festival de musique classique sis au creux des monts du Berkshire, dans le Massachusetts. James Levine, directeur musical du festival, mais aussi de l'Orchestre symphonique de Boston (BSO) et du Metropolitan Opera de New York, vient d'y diriger son dernier concert, le 18 août, avec La Damnation de Faust, de Berlioz.
Le temps de faire ses valises, d'aller écouter des étudiants chanteurs donner, le lendemain soir, des scènes d'opéra qu'il leur a fait travailler ces dernières semaines, le chef américain sera dans l'avion avec ses musiciens qu'il emmène en tournée européenne. Ils seront à Paris, pour cette même Damnation, à la Salle Pleyel, le 4 septembre.
MISE AU VERT
Il est temps d'ailleurs que les choses s'achèvent : le froid et l'humidité gagnent et finissent par décourager le public nombreux et fervent qui n'a guère l'habitude, en cette saison d'ordinaire étouffante, de se couvrir de plaids. Car Tanglewood est l'un des festivals de plein air les plus fameux au monde où, chaque été, quelque 350 000 mélomanes se pressent.C'est dans cette région enchanteresse que des dames patronnesses eurent l'idée, en 1937, d'organiser des concerts d'été donnés sous tente par l'Orchestre symphonique de Boston, dont le très charismatique chef d'origine d'origine russe Serge Koussevitzky fut le patron légendaire de 1924 à 1949. Cette mise au vert eut vite un succès colossal, mais, après quelques épisodes météorologiques fâcheux, il fut décidé de lever des fonds afin de construire un auditorium protégé. L'argent manqua à l'appel et ce fut un shed, un simple abri, qui fut édifié. On lui trouva vite du charme et des vertus, et il ne fut plus question de songer à s'enfermer.De plan triangulaire, cette structure métallique d'une désarmante simplicité bénéficie d'une acoustique étonnante pour un lieu ouvert pouvant accueillir 5 121 spectateurs. Mais plus vaste encore est le public qui choisit de venir pique-niquer ou siroter à l'extérieur et d'écouter, transmis par des haut-parleurs, les concerts de musique classique ou de musique populaire, quand l'Orchestre des Boston Pops prend le relais, ou encore le fameux festival de jazz et le concert, devenu rituel, du chanteur américain James Taylor.
Ce public débonnaire mais respectueux ignore parfois que Tanglewood est une ruche aux mille activités : s'y donnent les programmes pointus d'un festival de musique contemporaine (cette année, l'Américain John Harbison, compositeur en résidence, a choisi de saluer la "génération de 1938", étrange idée dont l'incongruité semble pourtant apéritive), de la musique ancienne (Jordi Savall et Frans Brüggen), des récitals et des concerts de musique de chambre donnés notamment dans le beau Seiji Ozawa Hall (du nom du précédent directeur musical du BSO), une salle de concert "traditionnelle" à ceci près que son arrière s'ouvre sur la campagne et laisse, à la tombée du jour, entrer les senteurs de l'herbe fraîchement coupée portées par l'air du soir.
CAMPUS D'UNIVERSITÉ
Mais Tanglewood, c'est aussi une célèbre académie d'été, sous l'administration de l'école que fonda le chef d'orchestre Serge Koussevitzky en 1940, le Tanglewood Music Center. Des cours et classes de maîtres sont donnés à de jeunes musiciens (chefs, chanteurs, compositeurs, musiciens d'orchestre). De sorte que, dans la journée, les lieux ont l'allure d'un campus d'université.Et la ruche a produit : beaucoup de solistes d'orchestre et de grands chefs y ont fait des études, tels Claudio Abbado, Lorin Maazel, Seiji Ozawa ou Michael Tilson Thomas. Et Leonard Bernstein, autre figure charismatique, élève préféré du grand "Kouss", qui dirigea son premier concert professionnel à Tanglewood, et le dernier, un funeste 19 août 1990, sous la pluie et le froid. Il y a dix-sept ans jour pour jour.